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Tax : Fiscalité immobilière

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Et si je détenais mon bien immobilier de placement par le biais d’une société immobilière ?

Grâce à une imposition du bénéfice des sociétés de capitaux devenue plus intéressante, la détention d’un bien immobilier de placement par une société immobilière peut être, dans certaines situations, fiscalement avantageuse.

1- Introduction

Un propriétaire foncier peut détenir son bien en direct ou indirectement par le biais d’une société dite alors « société immobilière ». Les impacts fiscaux des deux variantes sont différents puisque les revenus locatifs sont soumis à l’impôt sur le revenu en cas de détention directe tandis qu’ils sont soumis à l’impôt sur le bénéfice en cas de détention par une société.

Avec la baisse du taux d’impôt sur le bénéfice depuis le début de cette année à Genève, et déjà depuis l’année 2019 dans le canton de Vaud, les propriétaires de biens immobiliers pourraient avoir intérêt à repenser la structure de détention de leur patrimoine immobilier en optant pour un transfert de leurs biens[1] à une société.

[1] Nous parlons ici bien d’immeubles de placement et non du logement familial qui, à notre sens, n’a aucun intérêt fiscal à être détenu via une société puisque l’actionnaire-locataire doit alors payer un loyer à sa société pour l’occupation du bien.

2- Qu’entend-on par « société immobilière » ?

Une « société immobilière » (souvent abrégée « SI ») est une société qui a pour but la détention et la gestion de biens immobiliers. Elle revêt le plus souvent la forme d’une société anonyme (SA) ou d’une société à responsabilité limitée (Sàrl). Sous l’angle fiscal, la SI est imposée comme une société ordinaire et ses propriétaires comme des actionnaires traditionnels. La seule différence provient du traitement fiscal applicable à la vente d’actions d’une SI. En effet, lorsqu’un contribuable vend des actions d’une SI détenue dans sa fortune privée, le gain en capital réalisé est généralement soumis, au niveau cantonal, à l’impôt sur les gains immobiliers, la SI étant assimilée à un immeuble. En fonction des cantons, il faut aussi prendre en compte éventuellement le droit de mutation.

3- Transfert d’un bien immobilier à une SI

Lors du transfert d’un bien détenu dans la fortune privée d’un contribuable à une SI (transfert qui prend généralement la forme d’une vente), les impôts suivants sont prélevés systématiquement :

- L’impôt spécial sur les gains immobiliers
- Le droit de mutation

L’impôt spécial sur les gains immobiliers est prélevé de manière distincte des autres revenus du contribuable sur la différence entre le prix de vente à la SI et la valeur d’acquisition, et ce à un taux dégressif. A Genève, ce taux est compris entre 50 % pour une durée de détention de moins de 2 ans et 0 % après 25 ans de détention. A noter qu’un projet de loi cantonal actuellement débattu prévoit de supprimer cette exonération et d’imposer les gains immobiliers à hauteur de 10 % dès la dixième année de détention. Dans le canton de Vaud, le taux d’imposition oscille entre 30 % pour une durée de possession de un an et 7 % dès vingt-quatre ans de détention.

Le droit de mutation est quant à lui perçu sur la valeur vénale de l’immeuble à un taux approximatif de 3.5 %.

Le transfert d’un immeuble dans une SI engendre ainsi des coûts financiers importants (impôt sur les gains immobiliers et droits de mutation) dont il y a lieu de tenir compte au moment de l’opération.

En revanche, le prix de vente peut être inscrit en dette dans les comptes de la société et peut être remboursé en neutralité fiscale à l’aide des bénéfices réalisés par la société.

4- Principales différences entre une détention directe et une détention par une société immobilière

Directe

Indirecte

Imposition des revenus locatifs

impôt sur le revenu (taux maximum d’imposition) :

  • 45% à Genève
  • 41.5% dans le canton de Vaud

impôt sur le bénéfice :

  • Environ 14% dans les deux cantons

Amortissements comptables[2]

non applicable

amortissement de 1 à 8% sur la valeur comptable du bien

Stratégie quant au retour sur investissement

pas de stratégie envisageable, les rendements sont directement attribuables au propriétaire

  1. Remboursement de la dette actionnaire
  2. Distribution de dividendes

[2] À noter toutefois qu’en cas de vente ultérieure de l’immeuble par la société, les amortissements cumulés seront soumis à l’impôt sur le bénéfice.


I. Remboursement de la dette actionnaire

Une dette actionnaire peut être enregistrée dans les comptes de la société, à hauteur du prix de vente lors de l’acquisition de l’immeuble par la SI. Dans le futur, tous les remboursements effectués se feront en neutralité fiscale, à savoir sans impôt pour l’actionnaire.

II. Distribution de dividendes

Une fois la dette actionnaire remboursée, la remontée des loyers vers l’actionnaire prendra généralement la forme d’une distribution de dividende, laquelle est imposable. Les taux d’imposition maximum des dividendes sont de l’ordre de 31.5 % à Genève et de 29.05 % dans le canton de Vaud pour autant que l’actionnaire détienne au moins 10 % du capital-actions de la société.

5- Cas pratique : vente d’un immeuble genevois et vaudois à une société

Afin d’illustrer les avantages fiscaux du transfert d’un immeuble à une SI, nous avons retenu les hypothèses suivantes :

- Contribuables mariés et imposés au taux maximum

- Acquisition de l’immeuble en 1990 au prix de CHF 6'000'000

- Estimation fiscale du bien de CHF 8'000'000 (en vigueur depuis plus de 10 ans) ;

- Revenus locatifs annuels nets (après charges) de CHF 400'000 ;

- Vente de l’immeuble à une SI détenue par les contribuables en 2020 au prix de CHF 10'000'000 (valeur vénale) ;

- Mise en place d’un crédit-vendeur (dette actionnaire) de CHF 9'900’000

I. Coûts de transfert (en CHF)

Le transfert de l’immeuble à la société engendre les coûts suivants :

Genève

Vaud

Impôt spécial sur les gains immobiliers

0.-

140’000.- [3]

Droit de mutation (à charge de la société)

349’200.-

330’000.-

[3] Le couple peut invoquer l’estimation fiscale du bien, en lieu et place du prix payé, car elle a été notifiée après l’acquisition du bien et est en vigueur depuis au moins dix ans lors de l’aliénation. L’impôt sur les gains immobiliers est ainsi prélevé sur la différence entre la valeur de vente (CHF 10’000’000) et l’estimation fiscale du bien (CHF 8’000’000) au taux de 7 %.

II. Charges fiscales liées aux revenus locatifs[4]

Canton

Genève

Vaud

Détention

Directe

Indirecte

Directe

Indirecte

Revenus annuels locatifs nets

CHF 400’000

CHF 400’000

CHF 400’000

CHF 400’000

Impôt sur le revenu

(CHF 180'000)

(CHF 166'000)

Impôt sur le bénéfice et capital

(CHF 33'800)

(CHF 33'300)

IIC complémentaire / Impôt foncier

(CHF 8'000)

(CHF 12'000)

Charge d’impôt totale

(CHF 180'000)

(CHF 41'800)

(CHF 166'000)

(CHF 45'300)

Trésorerie à disposition du couple

CHF 220’000

CHF 358’200

CHF 234’000

CHF 354’700

Avantage financier de la solution indirecte

+CHF 138’200

+CHF 120’700

[4] Les simulations ne tiennent pas compte de l’impôt sur le capital, étant précisé que celui-ci est totalement imputable sur l’impôt sur le bénéfice dans le canton de Vaud et l’est, pour le moment, partiellement dans le canton de Genève. Par ailleurs, les simulations ne prennent pas en compte d’éventuelles charges liées à l’immeuble.

Selon nos estimations concernant le canton de Genève, les coûts de transfert de CHF 349’200 (i.e. impôt sur les gains immobiliers et droit de mutation) sont amortis en seulement deux ans et demi grâce à l’économie fiscale annuelle réalisée durant ces années. En effet, sur le long terme, la détention par une SI permet une économie fiscale de plus de CHF 120’000 par année. Finalement, pendant environ trente ans, le couple pourra recevoir un montant annuel d’environ CHF 350’000 en franchise d’impôt de par le remboursement de son compte courant actionnaire, alors qu’il ne percevrait que CHF 220’000 (CHF 234’000 dans le canton de Vaud) en cas de détention directe.

Conclusion

Bien que la vente d’un bien à une SI engendre des coûts importants et inévitables au moment du transfert, ces derniers peuvent être assez rapidement amortis grâce au gain fiscal engendré par la détention indirecte. Par ailleurs, la détention d’un patrimoine immobilier par le biais d’une SI peut s’avérer avantageuse dans le cadre de successions ou de donations dans la mesure où la transmissibilité d’actions est plus aisée qu’un transfert d’une quote-part d’immeuble.

Pour conclure, nous rappelons qu’il est néanmoins indispensable d’étudier chaque situation et de procéder à des simulations fiscales avant de procéder à une telle opération.

Le département fiscal de Berney Associés se tient à votre entière disposition pour procéder à une analyse de votre situation et vous conseiller sur la restructuration de votre patrimoine immobilier.

info@berneyassocies.com

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